
L’année 1952 marque un tournant majeur dans l’histoire de l’Égypte avec la révolution qui renverse la monarchie et installe Gamal Abdel Nasser au pouvoir. Parmi les nombreuses réformes mises en place par le nouveau régime, la loi agraire de septembre 1952 se distingue comme une mesure audacieuse visant à restructurer la propriété foncière et redistribuer les terres aux paysans. Cette loi, symbole du nationalisme arabe et du désir d’émancipation sociale, a engendré des conséquences profondes et durables sur l’économie, la société et la politique égyptiennes.
Contexte: une société inégalitaire face à l’impérialisme
Avant 1952, la propriété foncière en Égypte était concentrée entre les mains d’une petite élite terrienne, souvent issue de familles aisées ou alliée aux puissants propriétaires étrangers. Les paysans pauvres constituaient la majorité de la population et étaient soumis à des conditions de travail abusives, avec des revenus insuffisants pour subvenir à leurs besoins. Cette situation engendrait une profonde inégalité sociale, nourrissant les tensions politiques et sociales.
L’Égypte était également sous l’influence économique et politique de puissances étrangères comme le Royaume-Uni. La présence britannique en Égypte influençait la gestion des terres et favorisait souvent les intérêts des propriétaires étrangers aux dépens des paysans égyptiens.
Les objectifs ambitieux de la loi agraire:
La loi agraire visait à redresser les inégalités foncières en redistribuant les terres aux paysans pauvres. Ses objectifs principaux étaient:
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Limiter la taille maximale des propriétés: La loi fixait une limite maximale de superficie pour les propriétaires terriens, contraignant ceux dépassant cette limite à céder une partie de leurs terres à l’État.
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Redistribuer les terres aux paysans: Les terres confisquées aux grands propriétaires étaient ensuite redistribuées aux paysans sans terre ou ayant des exploitations de petite taille. L’objectif était de créer une classe de petits propriétaires indépendants et de réduire la dépendance des paysans envers les grands propriétaires fonciers.
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Promouvoir le développement agricole: En dotant les paysans de terres propres, la loi visait à stimuler l’investissement dans l’agriculture, améliorer la production agricole et renforcer l’autonomie alimentaire du pays.
Conséquences économiques et sociales:
La loi agraire a entraîné des changements importants dans le paysage économique et social de l’Égypte:
Impact positif | Impact négatif |
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Création d’une classe de petits propriétaires terriens | Résistance des grands propriétaires fonciers, parfois violente |
Augmentation de la production agricole | Difficultés pour certains paysans à gérer leurs nouvelles terres |
Amélioration des conditions de vie pour une partie des paysans | Déclin économique de certaines régions traditionnellement agricoles |
L’impact social de la loi a été ambivalent. Si elle a contribué à améliorer les conditions de vie d’une partie des paysans, elle a également généré des tensions sociales. Certains grands propriétaires fonciers ont résisté fermement à la loi, parfois en ayant recours à la violence. De plus, l’attribution de terres aux paysans n’a pas toujours été équitable et efficace.
Conséquences politiques:
La loi agraire a joué un rôle important dans la consolidation du régime Nasserien. Elle a renforcé le soutien populaire au nouveau gouvernement en répondant à des aspirations profondes à une société plus juste. La redistribution des terres a également contribué à affaiblir l’influence politique de l’ancienne élite terrienne, souvent alliée aux puissances étrangères.
En conclusion, la loi agraire de 1952 représente un tournant majeur dans l’histoire de l’Égypte. Bien qu’elle ait engendré des conséquences économiques et sociales complexes et parfois contradictoires, elle a contribué à transformer profondément la société égyptienne en ouvrant la voie à une plus grande égalité sociale et à une plus grande autonomie nationale.
L’héritage de la loi agraire:
Bien que la loi agraire ait connu quelques succès, elle n’a pas résolu tous les problèmes fonciers de l’Égypte. Des inégalités persistent dans l’accès aux terres et à la production agricole. Cependant, elle reste un symbole important des aspirations populaires à une société plus juste et équitable. Elle témoigne également de la volonté du régime Nasserien de briser les structures anciennes et de construire une nouvelle Égypte basée sur des valeurs de socialisme arabe et d’indépendance nationale.